La logistique urbaine perd un de ses historiens

paris 2000 ans d'histireJean Favier, éminent historien, nous a quittés. Il nous laisse de nombreux ouvrages dont Paris, 2000 ans d’histoire.

Ce très riche ouvrage sur l’histoire de Paris nous expose de façon détaillée les problématiques de transport de la capitale au fil des siècles. J’ai en mémoire un long chapitre sur l’histoire des ports de la capitale depuis Lutèce. Jean Favier nous raconte l’histoire des canaux de Paris, les canaux de l’Ourcq, Saint-Denis et Saint-Martin, dont l’initiateur était Napoléon.

Jean Favier nous dit à ce propos que « l’implantation de ces canaux bouleverse l’implantation des fonctions portuaires et industrielles, accentuant la vocation industrielle des quartiers périphériques du nord et de l’est. ». Il mentionne qu’au début du XXe siècle, le trafic des ports parisiens était « de 22 millions de tonnes aujourd’hui, dont 3 millions pour le trafic international. ».

Mais Jean Favier s’intéresse à de nombreux autres sujets dans ce livre, dont le chemin de fer et la relation postale. Il nous rappelle, ironie de l’histoire, que le chemin de fer n’a pas été créé pour transporter des passagers, mais des marchandises.

Après avoir permis d’approvisionner à Paris des marchandises, il a participé à alimenter la migration des populations vers la capitale.

Concernant la Poste, Jean Favier nous raconte l’histoire de la Poste Royale, créée par Louis XI en 1479 et le formidable réseau qui a été mis en place afin d’assurer la desserte du courrier et des messageries.

Au travers de cet ouvrage, Jean Favier nous rappelle donc que la logistique urbaine est un éternel recommencement.

Mais Jean Favier ne se limite pas à l’histoire ancienne. Il nous décrit l’histoire des autoroutes et de leur rôle dans le développement des transports.

Rendons hommage à ce très grand historien des transports, qui nous laisse des témoignages dont la lecture aide à mieux comprendre nos orientations futures.

Le ship-from-store, la tribune de Jérôme Libeskind dans E-commerce Magazine

Jérôme Libeskind a publié dans E-commerce Magazine, le 25 août, une tribune sur le ship-from-store.

Cet article explique comment le magasin peut devenir un point de départ des commandes e-commerce et aider à raccourcir le délai sans augmenter le coût du transport.

Les expériences des 2 start-ups Deliver.ee et Colisweb sont notamment détaillées.

Différentes expériences aux Etats-Unis servent également d’illustration à cette méthode de gestion logistique de l’e-commerce, qui tend à se développer.

article e-commerce magazine 25-8-2014

 http://www.ecommercemag.fr/Thematique/solutions-logistique-e-paiement-1011/logistique-10047/Breves/Tribune-ship-from-store-comment-magasin-devient-entrepot-244581.htm

Uber ré-invente le magasin de proximité

corner storeLa création du service Uber Corner Store est une initiative tout à fait intéressante à analyser qui a fait la Une des sites spécialisées ces derniers jours.

Uber propose pour le moment à Washington l’achat de produits d’un assortiment très réduit (100 produits différents) en provenance de magasins de proximité. Il s’agit d’achat de dépannage comme dans un magasin de proximité. Le prix passe après le service, qui est l’urgence. La livraison est effectuée par les livreurs Uber, professionnels ou particuliers et l’application Uber.

Cette expérience est à rapprocher de celle d’Amazon, qui dans son service Amazon Pantry, propose des produits de première nécessité ramenés au volume d’un carton. Vous achetez autant de produits, dans un assortiment réduit, jusqu’à ce que votre carton soit plein.

Ce qui est intéressant dans ces différentes initiatives, c’est qu’on sort du modèle traditionnel d’internet, qui consiste à disposer d’un choix le plus large possible de produits, à un prix le plus bas possible et un transport gratuit ou presque.

C’est le service qui est privilégié. Le transport gratuit, qui est une gageure dont la durée de vie sera nécessairement limitée, n’est pas l’argument présenté. Il s’agit là du dépannage, donc du besoin urgent, quotidien, qui a un prix. Notre magasin de dépannage est plus cher qu’un hypermarché. C’est normal et peu important pour la plupart d’entre nous puisqu’il s’agit de faibles quantités de produits.

Ce que nous apprennent ces expériences, c’est aussi qu’internet est encore un vaste terrain d’expériences ou le service, et notamment le transport du dernier kilomètre, devient le maillon principal. Le problème n’est pas le produit, qui est facile à trouver, mais la livraison. Ces expériences ne partent pas du produit, mais du besoin du consommateur. C’est donc du tout simplement du marketing.

Google shopping express, Deliv, Uber Corner Store, Uber Rush, Amazon Pantry, toutes ces idées sont fondées sur la livraison et le service à l’internaute. Aucune d’entre elle n’annonce un transport gratuit. Pour une simple raison, il a un coût. L’intégrer dans le prix du produit reviendrait à augmenter celui-ci, alors même que le consommateur accepte parfaitement un prix raisonnable du transport.

La livraison du dernier kilomètre n’a pas fini de nous surprendre par son caractère innovant.

Amazon est-il un agitateur d’idées ?

amazonIl ne se passe pas un jour en cette période estivale sans qu’Amazon soit au centre de l’actualité. Un jour, c’est la loi « anti Amazon », interdisant le cumul sur le prix des livres de la réduction de 5% accordée par la loi Lang et de la livraison gratuite. Amazon, comme d’autres d’ailleurs, ont décidé de facturer 1 centime et sont accusés de détourner la loi. Amazon ne la détourne en aucune façon mais applique la rédaction de cette loi à la lettre et au mot !

Cependant, nous pouvons nous étonner qu’Amazon, qui annonce des pertes historiques, continue de ne pas facturer un transport qui impacte directement ses résultats. Aurait-il moins de clients s’il facturait le prix de transport ? Rien n’est moins sûr.

Si Amazon effectue des pertes sur les ventes de livres, ce qui reste à vérifier, le cadre légal existe déjà avec la loi sur la vente à perte de 1963, interdisant de revendre moins cher, prix de transport compris, que le prix d’achat.

Amazon est attaqué par un ministre et soutenu par un autre qui se targue des emplois créés dans des centres logistiques qui bénéficient souvent d’aides. Il y a là une certaine incohérence. Amazon est-il créateur de richesse et mérite-t-il les éloges ministérielles et aides à son développement ou est-il destructeur de richesse et mérite-t-il une loi à son encontre, loi qui n’a d’ailleurs aucun effet, sauf de lui faire une publicité gratuite.

Un autre jour, c’est l’annonce du développement dans 6 villes américaines du service de livraison jour J, qu’Amazon fait d’ailleurs payer ! L’internaute commande avant midi et est livré avant 21 heures. C’est évidemment une organisation logistique complexe avec un appui sur des commerces de proximité et des fulfillment centres localisés près des villes. Le lendemain, Google Shopping Express décide d’attaquer Amazon sur ce terrain et s’associe à Barnes & Noble afin d’offrir le même service.

La pause estivale est encore perturbée par une nouvelle pour le moins surprenante. Alors qu’Amazon investit dans la livraison jour J, il décide de récompenser les internautes qui ne sont pas pressés et acceptent d’être livrés en une semaine ou plus.

Dans toutes ces nouvelles qui se succèdent, il y a un point commun, le transport du dernier kilomètre. Il y a également deux enjeux fondamentaux : le client, celui qui paie, qui achète, qui décide et le commerce de proximité, celui qui est menacé.

Mais cette menace ne date pas d’hier. Elle date du développement de la grande distribution, des centres commerciaux et autres hypermarchés, dont les conséquences ont été la baisse des prix mais surtout la disparition progressive des commerces de centre-ville.

La grande réussite d’Amazon, c’est d’avoir le rôle d’agitateur d’idées qu’avait la FNAC à sa création, en 1954….

Qui était Charles de Freycinet ?

DSC_0171[1]Il y a 100 ans, la France comptait 40 000 kms de voies ferrées exploitées. Le réseau est aujourd’hui de 29 000 kms seulement, ceci en comptant toutes les constructions récentes. Ce plan de développement du réseau avait un nom, celui de Charles de Freycinet.

Charles de Freycinet

Charles de Freycinet

Ministre des travaux publics pendant seulement 2 ans, Freycinet a laissé son nom au fameux gabarit. En effet, c’est lui qui a décidé de moderniser le réseau de canaux en France en créant une norme pour les écluses et en imposant un gabarit homogène. Le sas d’écluse fait 39 mètres par 5,20 m de large. Ainsi, les barges de 300 tonnes et 1,80 à 2,20 m de tirant d’eau peuvent circuler sur le réseau.

Visionnaire, le plan Freycinet pour le réseau ferré était fondé sur un principe, l’équité des territoires devant le développement technologique. Le but était de désenclaver par l’apport du chemin de fer les régions les plus éloignées. Chaque sous-préfecture de France devait avoir sa gare. Le plan fut mis en œuvre jusqu’à la sous-préfecture la plus éloignée, à trois exceptions près, Sartène, Barcelonnette et Castellane. L’Etat impose ainsi aux compagnies privées la construction de 11 000 km de lignes nouvelles.

Cette desserte du territoire par le chemin de fer a un coût considérable. On découvre à l’époque l’absence totale de rentabilité de desservir des campagnes et petites villes du territoire. Progressivement, sous l’effet de la concurrence de la route, dont les infrastructures sont gratuites pour l’usager, les lignes sont fermées, ce à partir de 1938.

Pendant cette période estivale et ce week-end de chassé-croisé entre juilletistes et aoutiens, nous voyons des autoroutes bondées et profitons de la découverte de notre beau pays, traversé par des infrastructures d’une autre époque, celle du ferroviaire et du fluvial, abandonnées ou désespérément vides.

Evidemment, Freycinet n’était pas un bon gestionnaire. Investir dans des infrastructures structurellement déficitaires n’est pas un bon choix de gestionnaire. Cependant, rendons-lui hommage en mettant en avant ce qui nous manque aujourd’hui en France, une vaste politique d’infrastructures. Une politique énergétique dans le domaine des transports passe nécessairement par un investissement dans les infrastructures. Que ce soit la mise aux normes de notre réseau ferré, la construction du canal Seine Nord ou la construction de terminaux combinés, nous n’échapperons pas aux infrastructures pour développer une véritable politique de transfert dans le domaine des marchandises.

Si nous ne voulons pas aller vers une écologie punitive comme le font nos voisins britanniques, nous devrons nécessairement investir dans des infrastructures qui permettent un transfert énergétique sans perte d’efficacité. C’est ce qui avait été prévu et qui n’a pas appliqué dans le Grenelle de l’Environnement. Le projet de loi actuel ne prévoit rien dans ce sens, faute probablement de moyens de l’Etat. L’écotaxe était une réponse mais elle a été abandonnée au trois-quarts.

Là où Freycinet avait raison, c’est qu’un enjeu, à l’époque de desserte des campagnes et aujourd’hui de transfert énergétique, ne doit pas toujours faire l’objet d’un raisonnement de rentabilité à court terme. Dans l’enjeu actuel de transfert énergétique, c’est la santé des habitants qui est en question. Punitive ou positive, l’écologie a surtout besoin de pragmatisme et de volontarisme politique, tant pour le transport des marchandises en transit sur notre territoire, que pour la logistique urbaine.