Et si nous réinventions la vente Tupperware ?

L’excellent article paru aujourd’hui dans Télé 7 jours, montre que nous n’en avons pas terminé avec une forme de vente oubliée depuis longtemps, la vente à domicile.

Article Télé 7 Jours du 17 janvier 2015 avec interview de Jérôme Libeskind

Article Télé 7 Jours du 17 janvier 2015 avec interview de Jérôme Libeskind

La vente à domicile, associée à Tupperware, qui la pratique depuis … 1951, retrouve toute sa pertinence dans l’époque d’économie collaborative qui est la nôtre. Transformer son appartement en magasin pendant un temps donné, faire venir des voisins, amis, connaissances afin de leur faire partager les avantages d’un produit ou leur faire tester des nouveautés est à la fois un concept ancien et étonnement moderne.

Il s’agit bien là de créer une communauté à l’échelle d’un quartier afin de vendre des produits. Il s’agit aussi de partager un espace privatif, son logement, en espace commercial pour un temps limité. En ce qui concerne l’utilisation de l’espace, le modèle est assez proche de celui de Airbnb ou de Blablacar.

Sur le plan logistique, nous sommes dans le cadre d’un magasin éphémère, qui va recevoir des produits en temps masqué et les vendre directement ou va prendre des commandes auprès de sa communauté.

Le concept présente de nombreux avantages. Les coûts commerciaux sont réduits par l’absence de surface de vente. Les livraisons sont consolidées auprès d’un seul point qui gère le dernier kilomètre, « l’ambassadeur ». Il évite des coûts logistiques, d’emballage  et de transport souvent importants dans l’e-commerce. Il peut permettre à de nombreuses personnes qui ont des qualités commerciales et un peu de temps disponible de trouver un revenu d’appoint.

La grande différence avec le modèle Tupperware est internet. Il peut servir de levier à la prospection et à la préparation de la vente.

Au travers de cet exemple, Earl Tupper (le fondateur de la marque bien connue) nous apprend que le mode de commercialisation peut être un élément différenciateur sur le plan commercial. Ses produits n’ayant pas eu de succès dans le réseau traditionnel de l’époque, il ne renonce pas et essaie un autre canal de vente, la vente à domicile.

Les vendeuses utilisaient pour cela leurs réseaux sociaux, en quelque sorte leurs voisins, amis, amis de leurs amis et ainsi de suite…

Pas encore cross-canal, Earl Tupper nous a cependant donné une formidable leçon de réussite commerciale et logistique face au système de distribution installé

Le modèle d’Earl Tupper, qui a quasiment le même âge qu’un autre modèle de distribution bien connu, connaîtra-t-il un jour le même succès ? Cabu aurait peut-être eu son avis sur la question…

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Charlie Hebdo, est-ce un problème de livraison ?

Nous devons acheter Charlie Hebdo. Oui bien sûr. Mais le problème est qu’il est introuvable.

Les marchands de journaux nous expliquent qu’ils n’ont pas été livrés, laissant imaginer qu’il s’agit là d’un problème de livraison et donc de dernier kilomètre.

En fait, le problème auquel nous sommes confrontés est typiquement un problème de planification de la demande et d’absence d’analyse prédictive. 1 million d’exemplaires, puis 3 millions, maintenant 5 millions. Nous sommes probablement bien loin du compte. Pourquoi une famille de 4 personnes n’achèterait pas 4 numéros ? Le vrai chiffre serait-il donc 65 millions, afin que chaque français puisse avoir son numéro et mieux réfléchir à l’importance des évènements récents pour notre démocratie.

Au-delà du drame de cette tuerie, nous apprenons, chose incroyable à l’heure du numérique, que rien ne remplace l’exemplaire papier. Consulter Charlie Hebdo, sur internet, c’est bien, mais ce n’est pas ce que demande le consommateur. Il veut lire l’exemplaire papier comme à la grande époque des journaux humoristiques.

C’est pour la très grande majorité des français la toute première fois qu’ils lisent Charlie Hebdo. Pour ma part, la lecture de Charlie Hebdo me rappelle les années lointaines du lycée. Certains lisaient Charlie Hebdo, d’autres Minute, ce dernier journal ayant l’avantage, nous expliquait Pierre Desproges, de ne pas avoir besoin de lire Sartre car on avait à la fois la nausée et les mains sales.

L’incroyable situation dramatique actuelle donne curieusement une nouvelle vie à la presse papier. Le Canard Enchaîné devient difficile à trouver, comme Libération, qui augmente son tirage.

La bonne nouvelle, s’il y en a une, c’est que la presse papier, moribonde du fait d’internet, retrouve dans cette situation ses lettres de noblesse. Lire Charlie Hebdo sur internet est bien, mais le lire en vrai, le toucher, le feuilleter, c’est mieux.

Le problème de la livraison, ou de l’absence de livraison est en fait un problème industriel. Editer de façon imprévue un tel nombre d’exemplaires pose évidemment de nombreux problèmes techniques. Le logisticien est alors le bouc émissaire, celui qui ne parvient pas à livrer. Nous logisticiens, nous savons parfaitement faire la différence entre logistique de production et logistique de distribution.

Espérons que ce tirage exceptionnel ne soit pas un acte unique mais que nous continuerons à lire Charlie Hebdo régulièrement, afin que les dessinateurs assassinés restent à jamais dans notre mémoire.charlie

Mon hommage à Cabu

En cette période de mémoire et de recueillement, j’ai choisi quelques dessins de Cabu sur l’énergie, la ville, le transport, la mobilité… Il nous laisse un héritage logistique inégalé. Alors profitons de ce moment !images              Cabu

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2015 sera-t-elle l’année de la logistique urbaine ?

Quelques événements marqueront sans aucun doute l’année qui débute mais avec de nombreuses incertitudes.

Tout d’abord, la transition énergétique voulue par les autorités politiques de tous bords pourrait être mise à mal par un coût très bas du pétrole, si celui-ci perdure. Comment convaincre les consommateurs ou les transporteurs d’investir dans des véhicules électriques chers alors que l’essence et le diesel sont très bon marché ?

La réglementation environnementale est clairement et pour plusieurs années reléguée aux oubliettes après l’arrêt de l’écotaxe, qui coutera 839 millions €.

Un des sujets sera alors d’utiliser les portiques qui deviennent la propriété de l’Etat. On peut imaginer que certaines régions comme l’Ile de France ou l’Alsace proposent des utilisations et taxations régionales. Ce serait probablement la meilleure solution de sortie de ce dossier épineux.

Les recettes de l’écotaxe devaient surtout participer au financement de nombreuses infrastructures de transport de voyageurs et de marchandises indispensables aux évolutions de la mobilité. Quelles seront les nouvelles sources de financement proposées ?

Le diesel probablement mais peut-être également d’autres sujets comme les péages autoroutiers. Nous y verrons probablement plus clair dans les prochains mois.

L’aéroport de Notre-Dame-des-Landes sera-t-il confirmé ou abandonné ? L’année 2015 sera une étape clé pour l’avenir de ce projet très contesté.

2015 verra sans aucun doute le développement des réseaux de consignes pour les livraisons B to C. La France va pouvoir rattraper une partie de son retard sur l’installation en infrastructures de consignes, indispensables à l’amélioration de la distribution du dernier kilomètre B to C. Deux réseaux, Packcity et Abricolis ont prévu de se déployer sur l’ensemble du territoire en 2015. Les consignes deviendront une alternative aux points relais traditionnels et constitueront sans aucun doute un des principaux moyens de retrait des colis.

2015 sera-t-elle l’année des Centres de Distribution Urbaine ? Certains projets notamment à Paris, pourraient voir le jour en 2015 ou 2016. Ils peuvent constituer de véritables solutions afin de réduire le nombre de véhicules dans la capitale. Le Conseil de Paris délibérera sur le plan antipollution, récemment annoncé,  qui comprend un volet marchandises. L’ambition de la municipalité dans ce domaine est importante et aboutira inévitablement à des mesures choc. Paris affiche la volonté d’être une ville pilote sur le plan de la logistique urbaine. C’est une excellente nouvelle.

L’accélération des flux nécessitera en 2015 le développement et l’invention de nouvelles solutions. L’enjeu de la livraison jour J devient énorme et nécessitera des organisations. Le ship-from-store, solution visant à expédier directement des magasins des produits achetés sur internet, dans un rayon de proximité permettant une livraison en 2 ou 3 heures, se développera sans aucun doute.

Le groupement HEC Transports animera le 2 avril sur la SITL une conférence sur ce sujet important.

Que deviendra le modèle Uber en 2015 ? Même si l’interdiction du service est actée dans l’immédiat, on peut imaginer que le législateur ne pourra pas s’opposer aux évolutions normales des formes de mobilités dans les villes, qu’elles soient pour les passagers ou pour les marchandises. Uber a le mérite de faire bouger les lignes.

La Loi Macron, qui prévoit notamment la libéralisation des lignes d’autocar, afin de faciliter les transports interurbains, compensant notamment les prix souvent élevés du train, sera-t-elle suivie en 2015 de la libéralisation d’autres pans de l’économie des transports ?

2015 sera-t-elle l’année de l’extension de l’économie collaborative à la livraison et à la logistique ? L’importance prise par ces services aux Etats-Unis laisse penser que cette tendance profonde de modification logistique traversera l’Atlantique. La récente levée de fonds du site web Instacart de 210 millions $ montre l’enjeu de la livraison du dernier kilomètre et les nouveaux modèles à inventer. L’épisode Uber, qui s’attaque de plein front à la corporation des taxis, laissera-t-il la place à de nouveaux modèles, qui permettront de créer des services aux consommateurs et de l’emploi sans concurrence directe avec les professions installées?

Une chose est certaine : la logistique urbaine ne se fera pas dans l’avenir sans une dose d’économie collaborative.

Bonne et heureuse année logistique 2015 !

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