A deux semaines des élections municipales à Paris, il est utile de comparer les programmes définitifs des deux principales candidates sur le sujet de la logistique urbaine.
Tout d’abord, c’est une bonne nouvelle ! Pour la première fois, le sujet existe. Jusqu’à présent, nous entendions dire que les personnes votent mais pas les colis. Manifestement les choses changent et même peut-être assez rapidement.
Examinons les propositions en détail.
Le programme de Nathalie Kosciusko-Morizet expose sur ce sujet des propositions dans différents chapitres.
Tout d’abord dans le chapitre sur les déplacements. NKM propose de faire de Paris la ville des véhicules propres. « L’achat de véhicules utilitaires électriques sera encouragé et les modes alternatifs à la route seront privilégiés, notamment la Seine, pour le transport des marchandises ».
Le chapitre sur l’amélioration de la vie des parisiens inclus un chapitre sur l’amélioration de la circulation et la lutte contre la pollution. NKM propose « des trottoirs intelligents, un réseau de capteurs de pollution, et un centre pilote pour la logistique urbaine ». Ce n’est pas nécessairement précis mais c’est là une très grande avancée.
Les 10 engagements pour mieux respirer comportent des mesures très claires et tout à fait nouvelles pour Paris. « Interdire Paris aux poids-lourds et aux cars les plus polluants. Des restrictions à la circulation seront imposées, dès 2017, pour les poids-lourds et les cars les plus polluants. » Cette proposition s’apparente à la création d’une Low Emission Zone, qui existe déjà dans de nombreuses villes européennes dont Londres. Concernant Paris, cette mesure peut également aider à la rationalisation de la distribution.
Ce chapitre mentionne également la volonté de doubler le bonus écologique pour les TPE et artisans, la création de bornes de recharge rapide. Le programme de NKM prévoit également, dans ce chapitre, l’interdiction des livraisons bruyantes à partir de 22h. Cela signifie-t-il que la porte est ouverte au développement des livraisons de nuit non bruyantes ? Il est également prévu « la création de nouvelles plates-formes de livraison pour limiter le nombre de camions dans Paris ». Ces plates-formes s’apparentent à des centres de consolidation et le message est donc clair.
Enfin, le programme de NKM prévoit la réalisation d’un nouveau quartier Bercy Charenton, qui alliera « commerce de proximité, artisanat, recherche et pôle logistique ».
Examinons maintenant le projet d’Anne Hidalgo. Anne Hidalgo nous rapproche tout d’abord de l’histoire notamment concernant l’importance du lien entre logistique et approvisionnement. « depuis l’Antiquité, la maîtrise de l’approvisionnement alimentaire est la clé du développement des villes ». Anne Hidalgo nous expose le risque pour elle sur l’approvisionnement de Paris en cas de blocage des transports ou de pénurie de carburant.
Le chapitre transports et déplacements comprend des propositions claires. « Je veux traiter le problème des poids lourds. Je souhaite diminuer leurs nuisances, et fixer l’objectif de 50 % des livraisons du dernier kilomètre en mode non diesel en 2017, pour atteindre le zéro diesel en 2020. Je lancerai des projets de plateformes « fleuve et fer », à l’image des premières réalisations réussies dans ce domaine au cours de la mandature précédente. Avec la profession, je travaillerai sur des dispositifs facilitant le stationnement pour livraison comme, par exemple, des applications de réservation de la place. ». L’utilisation de modes alternatifs à la route et la réduction des véhicules poids-lourds au diesel est donc bien à l’ordre du jour.
Le chapitre du programme d’Anne Hidalgo sur le commerce et l’artisanat évoque clairement le sujet des livraisons urbaines.
« Dans la continuité des projets réalisés au cours des dix dernières années, j’impulserai une politique de modernisation et de remise en service des ports et des plates-formes ferroviaires de livraison. Le tout, dans une perspective plus écologique.
50% des livraisons du dernier kilomètre devront être réalisés en véhicules non diesel. J’accompagnerai l’acquisition de véhicules électriques ou hybrides de livraison pour les artisans, commerçants, petits réparateurs. Je trouverai des canaux innovants pour le transport de marchandises : de type « Tramfret » ou l’utilisation du réseau du Nouveau Grand Paris express. Je travaillerai avec Rungis à la création d’un fret propre de livraison de marchandises alimentaires. Je multiplierai les espaces logistiques urbains bien intégrés, comme aux Olympiades ou Montparnasse. Je poursuivrai la mutualisation des aires de livraison, en repoussant à 8 heures la limite pour quitter la place. J’installerai un dispositif de réservation des places de livraison pour les professionnels avec application Smartphone ou Internet, et l’installation de bornes électriques à recharge rapide. » Nous parlons donc clairement de modes alternatifs à la route, de plates-formes de consolidation des flux et de mutualisation des places de livraison.
Nous constatons ici que la logistique urbaine existe réellement dans les deux programmes, avec des nuances, notamment autour de la réglementation ou des sites expérimentaux choisis. Plusieurs points communs : pour la première fois, l’utilisation de modes alternatifs à la route est clairement prévue ; le camion au diesel est rejeté, mais on imagine des solutions. C’est là la grande nouveauté.
Les années qui viennent seront particulièrement intéressantes pour la logistique urbaine !