La logistique urbaine : une prise de conscience dans toutes les villes européennes

Il est étonnant de constater que la logistique urbaine est au cœur des préoccupations des principales villes européennes. Le Bestfact Workshop, qui vient d’avoir lieu les 29 et 30 janvier à Bruxelles, a été l’occasion de faire un point sur les expériences dans de nombreuses villes européennes.cargo-cycle de la société Txita- San Sebastian

Les discours théoriques ont clairement laissé place à des expériences concrètes, ceci dans de très nombreux pays. Ces expériences peuvent être classées sous différentes formes :

1– les expériences de centres de consolidation dus à une initiative publique. les exemples présentés étaient notamment en Italie, aux Pays-Bas, en Suède et au Danemark. le projet de CDU de Bruxelles a également été cité.

2- les expériences privés de centres de distribution du dernier kilomètre en utilisant des moyens de livraison écologiques (cargocycles ou véhicules électriques). Nous avons pu assister aux présentations d’expériences dans différentes villes,  à Paris (The Greeenlink), à Londres, en Espagne et en Allemagne notamment.

3- les avancées technologiques sur les véhicules de livraisons urbaines et les initiatives de réseaux de location de véhicules électriques.

Des points communs sont apparus entre toutes ces initiatives vertueuses :

– un objectif de maîtrise du nombre de véhicules de livraison et de réduction sensible des émissions de CO2 dues à la distribution des marchandises. Les autres externalités négatives telles que bruit, particules fines, accidentologie, partage de la voirie ont été également clairement identifiées.

– une nécessité d’accompagner ces initiatives d’une évolution de la réglementation permettant à ces solutions de bénéficier d’un avantage par rapport à des solutions traditionnelles.

– l’importance de construire des solutions économiquement équilibrées.

– l’apparition de nouvelles contraintes liées aux évolution de la consommation (e-commerce notamment), qui perturbe fortement les schémas étudiés jusqu’alors autour des commerces de centre ville).

Ce workshop, qui regroupait des représentants de nombreux pays, témoigne de l’intérêt, soutenu par l’Union Européenne, pour de nouvelles pratiques de distribution des marchandises dans les villes. Il n’y a clairement pas de solution unique mais des initiatives vertueuses complémentaires qui vont dans le même sens : améliorer l’attractivité des villes.

Les programmes d’Anne Hidalgo et de NKM sur la logistique urbaine sont-il vraiment si proches ?

Le débat organisé en décembre par l’Afilog entre les deux principales candidates parisiennes semblait conclure sur une convergence de vues en ce qui concerne la logistique urbaine.

photo Hidalgo-NKMLa publication dimanche 26 janvier dans le JDD de l’interview de Nathalie Kosciusko-Morizet sur ses projets d’aménagement de Paris peut laisser penser que les différences sont en fait sensibles.

En effet, NKM indique dans cet interview que la ville est « de plus en plus stressée, polluée, bruyante ».

Le rôle de la voiture dans Paris est clairement mis en cause.

« Il est normal de vouloir limiter la place de la voiture en ville, et d’ailleurs toutes les métropoles mondiales le font », indique Nathalie Kosciusko-Morizet.

« Je veux expérimenter une piétonnisation partielle sur les quatre arrondissements du centre – les 1er, 2e, 3e et 4e –, ainsi que sur les « collines » de Paris, la montagne Sainte-Geneviève, Montmartre, Belleville. »

« J’y ferai deux propositions soumises au référendum : 1) réserver l’accès aux véhicules des résidents et aux livraisons, comme à Rome, avec un service de navettes et des parkings en bordure ; 2) faire un quartier tout électrique, c’est-à-dire réservé – hormis les résidents – uniquement aux véhicules électriques. Les deux solutions peuvent s’articuler. Bien sûr, cela ne concerne pas les grands axes circulants, comme le boulevard Sébastopol, la rue de Rivoli, la rue Réaumur, la rue Saint-Jacques… Je veux aussi mettre en œuvre un outil que j’ai forgé dans le Grenelle, la Zapa [zone d’actions prioritaires pour l’air], qui permet d’interdire, selon un calendrier défini à l’avance, les poids lourds et les cars les plus polluants dans Paris. »

A contrario, Anne Hidalgo ne parle pas directement de quartiers piétons mais d’une meilleure utilisation des sous-sols parisiens et de favoriser la « mixité fonctionnelle des immeubles ».

Elle veut clairement résoudre le problème du diesel et s’appuyer sur les infrastructures de multimodalité existantes (fleuve, gares, autoroutes).  Anne Hidalgo soutient les idées de conciergeries en pied d’immeubles ou les minis plateformes aménagées en sous-sol (parkings publics et privés, métro…).

Ce qui est certain, c’est que, dans quelques mois, les choses vont réellement changer car, pour la première fois, la logistique urbaine est au cœur des programmes des deux principales candidates.

Comme disait Georges Pompidou, « arrêtons de nous boucher les yeux » !

Haussmann était-il un logisticien ?

Le baron Haussmann n’est pas nécessairement le personnage auquel on pense en premier lorsqu’on évoque l’histoire de la distribution des marchandises.

De très nombreux livres ont été écrits sur l’œuvre d’Haussmann, parfois d’ailleurs critiquée pour avoir détruit le vieux Paris et surtout pour son coût exorbitant.

Haussmann a tout d’abord agrandi Paris en y annexant des communes suburbaines.

Photo de Haussmann en 1860Il a aussi rendu Paris viable. En effet, malgré les travaux effectués sous Napoléon Ier, Paris souffrait à l’époque de problèmes majeurs d’hygiène, de sécurité, de circulation et connaissait une population en forte croissance. Il avait comme mission d’améliorer la circulation, l’hygiène et la paix sociale. Napoléon III lui a demandé plus encore, il voulait embellir Paris et faire de Paris une ville aussi prestigieuse que Londres.

Nous n’y pensons pas tous les jours, mais son apport à la capitale a été essentiel. En seulement 17 années, de 1853 à 1870, Haussmann, préfet de la Seine,  a tout fait ou presque. Jamais Paris n’avais connu et ne connaîtra probablement autant de travaux. On lui doit bien sûr les avenues, mais aussi les parcs et jardins (parc Monceau, Montsouris, Buttes-Chaumont, Bois de Vincennes, notamment). On lui doit aussi l’amélioration des voies, des pavés, des trottoirs, de l’éclairage public, les promenades, les cimetières, les lycées et collèges, les théâtres, les égouts, de nombreux édifices religieux (d’ailleurs de différentes confessions), les hôpitaux et de très nombreux édifices publics.

Mais Haussmann était également intéressé par l’approvisionnement de la capitale. Tout d’abord en eau. L’eau provenait essentiellement du canal de l’Ourcq, créé par Napoléon 1er. Les volumes étaient très insuffisants pour approvisionner Paris. Haussmann est à l’origine de travaux énormes afin d’améliorer l’approvisionnement de Paris en eau, notamment par des puits artésiens, collecteurs, réservoirs, circuits d’adduction et autres équipements.

Haussmann s’est beaucoup intéressé aux Halles. En effet, c’est Haussmann qui a convaincu Napoléon III de confier à Baltard, qui était un ancien camarade d’Haussmann au lycée…, la construction des différents bâtiments des Halles. Napoléon III voulait du fer, rien que du fer… et rêvait de reproduire la gare de l’Est. Il rêvait de « vastes parapluies «  en fer et en verre. Haussmann avait d’ailleurs eu beaucoup de difficultés à convaincre Baltard, grand prix de Rome, de construire en fer.

Mais on doit également à Haussmann les abattoirs de La Villette, reliés par un embranchement, aux Chemins de Fer de Ceinture et pas un embarcadère, au canal de l’Ourcq. La Villette était donc un site multimodal !

Haussmann est également intervenu sur les canaux, les berges de la Seine, les ponts, les gares (la gare de Lyon notamment)…

Comme durant de nombreuses périodes historiques, l’approvisionnement de la capitale constituait un enjeu majeur afin de garantir le bien-être des habitants mais surtout la sécurité.

Ainsi, Haussmann a profondément modifié les infrastructures d’approvisionnement de la capitale, notamment les voies de circulation et équipements, mais aussi l’approvisionnement en alimentation (Les Halles et les abattoirs), en eau.

Evidemment, ce petit article est loin d’être exhaustif et n’en a pas la prétention. Il peut donner envie de lire ou relire les Mémoires du baron Haussmann et je citerais une phrase qui est essentielle dans l’œuvre d’Haussmann concernant Paris.

« La facilité de ses accès est une nécessité pour toutes les productions des départements, qui affluent sur ce grand marché. La commodité des points où se concentrent les approvisionnements, où s’opèrent les transactions diverses (…) »

Haussmann n’était-il donc pas un de nos grands logisticiens ?

Les expériences d’utilisation du tramway pour la distribution des marchandises

article de la Revue Générale des Chemins de Fer

La Revue Générale des Chemins de Fer vient de publier (numéro de janvier 2014) un article sur l’histoire de l’utilisation du tramway pour les marchandises et les expériences récentes de Dresde et de Zürich. Article rédigé par Jérôme Libeskind.

Résumé en anglais :

Experiments with use of tramways systems to distribute freight in Europe, a solution to reduce disturbances caused by freight transport in cities.

Use of tram networks to distribute goods in urban centres, similarly to what was sometimes done in the first half of the XXth Century, is an idea under consideration in numerous cities in Europe including Paris. To date, two specific practical applications warrant study : that of Dresden to serve an automobile plant located in the city and that of Zürich where the objective is to collect bulk waste.

Résumé en allemand :

Die Erfahrungen mit der Verwendung der Strassenbahn zur Verteilung der Güter in Europa, eine Lösung, um die Behinderungen des Güterverkehrs in der Stadt zu verringern.

Die Verwendung der Strassenbahnnetze für die Verteilung der Güter im Stadtzentrum, wie es zuweilen, in der ersten Hälfte des 20. Jahrhunderts praktiziert wurde, ist eine Überlegung bei zahlreichen europäischen Städten, wie u.a. Paris. Bischer verdienen zwei spezifische Umsetzungen eine nähere Untersuchung: das Projekt von Dresden, um ein Automobilwerk in der Stadt zu beliefern, sowie das Projekt von Zürich mit dem Ziel der Sperrmüllsammlung.

Un film sur la logistique urbaine ?

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le vélo livreur de gamelles... le vélo livreur de gamelles…   

C’est presque un film sur la logistique urbaine que nous voyons actuellement sur les écrans. Le film »Lunch Box » du réalisateur indien Ritesh Batra nous montre en détail le fonctionnement du réseau de livraison des « gamelles de Bombay », les dabbawalas.

Le principe est simple et date de … 1885. A cette époque, un banquier de Bombay a eu l’idée de demander tous les jours à un livreur de lui livrer à midi un plat cuisiné chez lui et de rapporter le contenant vide chez lui, le repas consommé. Le principe s’est structuré de façon industrielle en 1954.

Les flux sont impressionnants :

5000 personnes vivent à Bombay de cette activité, qui est déployée sur des distances allant jusqu’à 60 km et gèrent des flux de 200 000 « gamelles » (tiffins) dans chaque sens soit 400 000 mouvements par jour exclusivement en B to C !

dabbawala-2Traditionnellement, les personnes actives (majoritairement des hommes en Inde) se font , pour des raisons de tradition, livrer leurs repas faits à la maison, tous les midi, à leur bureau. Les contenants sont très standardisés et conditionnés dans des emballages isothermes, tous quasiment identiques. Ils sont acheminés tous les jours dans la matinée, du domicile vers le bureau, puis, après consommation, du bureau vers le domicile.

Cette organisation, unique au monde, a été analysée par de nombreux spécialistes, qui s’étonnent du niveau de qualité inégalé et des délais précis respectés, avec une infrastructure réduite au strict minimum. Pas de locaux, utilisation des transports en commun ou de vélos.dabbawalas-4

Quelles sont les clés de cette réussite ?

1) L’organisation est structurée en équipes de 20 à 25 personnes avec un chef d’équipe et un secteur géographique. Un code très précis (uniforme, charte, etc…) encadre le fonctionnement de chaque livreur.

2) Les livreurs sont toujours les mêmes et un rapport de confiance a été institué à tous les maillons de la chaîne. Avant le téléphone portable, ces gamelles seraient d’ailleurs de moyen de communication avec l’insertion de messages (notre film est d’ailleurs là pour prouver le bon fonctionnement de ce système!)

3) Un système de codification (pas de code barre…) très didactique a été mis en place permettant l’acheminement de la gamelle, l’adresse, l’étage, le service, le secteur, le point d’éclatement prévu, etc…

4) les aléas de transport en ville sont faibles puisque les livreurs utilisent les réseaux ferrés, vélos et bien sûr livrent à pied…

5) les livreurs sont membres d’une association et donc directement intéressés au résultat.

Les délais ?

Un enlèvement quotidien vers 9h30 et une livraison avant le déjeuner ! Les gamelles sont reprises après le déjeuner et livrée entre 16 et 17h.

La qualité ?

La réponse est donnée dans le film à un consommateur qui se plaint d’une erreur d’adresse. « C’est impossible ! Les experts d’Harvard sont tous venus et confirmé qu’il ne peut pas y avoir d’erreur! ». En fait les KPIs (respect des horaires et de l’adresse) affichent un taux de qualité de 99,999999% (une erreur sur 6 millions d’opérations), de quoi faire rêver les meilleurs directeurs supply chain!

Les Dabbawalas sont-ils alors un cas d’école (c’est en effet un cas de la Harvard Business School), un modèle ou une source d’inspiration pour les systèmes de distribution urbaine de demain ?

Les bureaux de ville : un maillon important dans le dispositif de logistique urbaine

bureau de villeLes bureaux de ville constituaient, pendant des décennies, un maillon essentiel du fonctionnement de la logistique dans Paris.

La réglementation définit d’ailleurs de façon précise la mission d’un bureau de ville : le commissionnaire prend en charge des colis ou des expéditions de détail et les remet séparément soit à des transporteurs publics, soit à d’autres commissionnaires.

Dans les années 1930, il était dénombré à l’intérieur de Paris environ 80 bureaux de ville privés. Ils avaient précisément comme rôle de collecter les colis provenant des expéditeurs, produire les documents d’expédition, peser les colis, percevoir le montant du transport et acheminer les colis vers les gares de marchandises. Ces marchandises étaient ensuite acheminées à destination par chemin de fer. Le rôle des bureaux de ville était en sens inverse de distribuer dans Paris des marchandises provenant de la province et acheminées par fer.

Progressivement, ceux-ci ont disparu et ce maillon intermédiaire, a lui aussi quasiment disparu. Le Sernam, qui était un acteur essentiel dans ce dispositif, a suivi la même évolution.

Depuis quelques années, les intervenants professionnels et publics, notamment la Ville de Paris, souhaitent favoriser la création de « bureaux de ville ». En effet, ces points locaux, situés dans quartiers de Paris, peuvent jouer un rôle important dans l’amélioration de la distribution des marchandises, notamment dans la situation que nous connaissons de développement des flux de colis du fait de la croissance de l’e-commerce.

Ils permettent en effet une massification des flux. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les quelques installations aujourd’hui opérationnelles sont situées dans un quartier générateur de flux BtoB, le Sentier.

La récente charte en faveur d’une logistique urbaine durable dont l’initiative revient à la Ville de Paris envisage d’ailleurs clairement le retour de ces installations. Elle mentionne qu’il s’agit de locaux de petites dimensions qui permettent de grouper et distribuer sur place des marchandises aux clients, ainsi que d’enlever des colis et plis apportés par l’expéditeur lui-même. Ce type d’équipement trouve toute sa pertinence à l’échelle d’un quartier.

Ces « bureaux de ville » pourront ainsi à nouveau trouver leur place dans l’organisation logistique de Paris, en complément des centres de distribution urbaine et des points relais.

La logistique urbaine n’a pas fini de rechercher des solutions pertinentes dans l’histoire !

2014, c’est aussi les 50 ans du schéma directeur d’aménagement de Paris…

Parmi tous les anniversaires qui marqueront cette année 2014, il me semble que nous devrions nous rappeler ce qui a été fait et imaginé il y a 50 ans en région parisienne.

Un homme est à cette période au cœur de tous les grands projets d’urbanisme de l’Ile de France, dont certains concernent très étroitement le sujet de la distribution des marchandises et de la logistique, Paul Delouvrier.

Mais qui était Paul Delouvrier ?delouvrier

Nommé délégué général au district de la région de Paris, il était un visionnaire et à l’origine des plus grands travaux réalisés en Ile de France depuis Haussmann. Il était à de Gaulle et Pompidou ce que Haussmann était à Napoléon III.

Ces travaux étaient basés sur une évolution démographique très importante. Il estimait que l’Ile de France aurait 14 millions d’habitants en 2000 (elle n’en avait heureusement que 12…) et que l’Etat devait donc réaliser les infrastructures nécessaires pour les besoins de cette population. La France avait à cette époque 40 millions d’habitants et l’Ile de France 8 millions. Cette évolution nécessitait donc de voir grand.

Paul Delouvrier aimait d’ailleurs citer un ministre de Louis XV qui disait : « Il est toujours risqué de prévoir ; mais, quand on prévoit, il est moins risqué de prévoir grand que de prévoir petit« .

Il a donc prévu grand : des villes nouvelles (c’est lui !), le RER (c’est encore lui), le boulevard périphérique (c’est lui et juste avant lui en 1959, peut-être pas à 70 km/h…), les voies express (qui deviennent progressivement piétonnes), le schéma directeur d’aménagement de la région de Paris (il y a cinquante ans… 1964), la prolongation des lignes de métro, … En ce qui nous concerne, Paul Delouvrier était au cœur des grands projets que nous appelons maintenant de « logistique urbaine » : le transfert du marché de gros des Halles à Rungis en 1969 (le transfert des abattoirs de La Villette s’est fait un peu plus tard, d’ailleurs dans conditions particulières), la création des gares routières : Garonor (au nord) et la Société de la gare routière de Rungis- Sogaris- au sud (1967).

En fait, Paul Delouvrier était, il y a 50 ans, l’inventeur du Grand Paris que nous essayons de construire aujourd’hui, ses réseaux de transport, ses infrastructures logistiques, ses pôles urbains (rappelons-nous les débats sur la distance de ces villes nouvelles du cœur urbain de Paris).Ile de France

La logistique urbaine et ses contraintes pour les décennies à venir nécessiteront des décisions, des plans, des choix de priorités. Mais l’enjeu est de taille. Alors relisons les travaux de Paul Delouvrier ! Nous y trouverons certainement des clés pour aller plus loin dans la démarche de logistique urbaine.

Le poids-lourd électrique a de l’avenir. Mais a-t-il un passé ?

camion électrique Renault

A l’heure où nous voyons émerger une véritable offre de véhicules de livraison électriques ou hybrides,  VUL ou poids-lourds et que de nombreux transporteurs investissent dans des moyens de transport plus respectueux de l’environnement, posons-nous la question de son histoire.

La voiture électrique aurait en fait été inventée il y a … 172 ans, par un écossais, Davidson. Cette voiture légère, supportée par quatre roues de 3 pieds de diamètre, avait une longueur de 4 yards et une largeur de 2 yards. 8 électro-aimants actionnés par des piles disposées sur le plancher du véhicule lui permettait de se déplacer. Cette machine rudimentaire aurait été vue assez fréquemment dans les rues d’Edimbourg, puis on n’entendit plus parler d’elle.

Certains mentionnent également le nom d’un autre écossais, Robert Anderson, qui aurait inventé un véhicule électrique avant 1840…

De très nombreux modèles de voitures électriques ont été imaginés et mis en service à partir de 1850. Le premier modèle véritable industriel de voiture électrique a été réalisé par Thomas Parker en 1884.

Ferdinand Porsche a créé en 1899 la première voiture hybride. Il a été suivi bien plus tard par Louis Krieger.

Mais qu’en est-il des camions électriques ?

A priori, les premiers véhicules utilitaires électriques datent du début du 20ème siècle. En 1904, la Ville de Paris (déjà en première ligne lorsque l’on parle de logistique urbaine!) décide de motoriser ses services postaux interurbains. La Ville de Paris effectue à cette époque des essais comparatifs entre des « peugeottes » à essence et des voitures électriques Mildé. Ces dernières sont  alimentées par de puissants accumulateurs qui permettent de faire rouler un poids de 2 tonnes et demie, à une vitesse moyenne de 30 km à l’heure, non compris 400 kilogrammes de correspondance . Les Grands magasins du Louvre suivront l’exemple avec des voitures du constructeur Thouvenin.

En 1925, il y a à Paris et en banlieue quinze points de recharges électriques. Cette période était sans conteste l’âge d’or des véhicules de livraisons électriques. Nous avons constaté un déclin des expériences lors de la seconde moitié du 20ème siècle, sauf en Grande-Bretagne, technologie utilisée pour les livraison de lait (le milkman…).

... en Allemagne de l'Est 1953

parc de camions postaux électriques … en Allemagne de l’Est 1953

Là encore, les idées de logistique urbaine s’inspirent du passé. La pollution existait au 19ème siècle, même peut-être à des niveaux beaucoup plus élevés qu’aujourd’hui dans les villes. Les préoccupations environnementales, même si elles n’étaient pas aussi formalisées qu’à notre époque, devaient certainement avoir des  défenseurs.

La décennie en cours sera certainement celle d’un renouveau des véhicules de livraison électriques. Le camion électrique ne résout évidemment pas tout. Certes, la pollution locale est inexistante, ce qui est déjà un atout majeur pour les centres urbains, mais restent les problèmes de production de l’électricité et de récupération à terme des batteries…

Jules Verne a-t-il inventé la livraison en ballon ?

Jules VerneEn cette période de vœux et d’approche des élections municipales, la logistique urbaine n’est pas de reste.

Notre Panthéon de la logistique urbaine, qui a récemment accueilli l’extraordinaire architecte Herctor Horeau et le bon roi Louis le Gros, mérite, en ce début d’année, d’être enrichi d’une nouvelle figure. Pour commencer l’année de façon grandiose, j’ai choisi Jules Verne.

Notre infatigable voyageur, sous les mers, dans les airs et sous terre, s’est-il tant que cela intéressé à la ville ? La logistique urbaine est-elle un voyage extraordinaire ? Après les drones d’Amazon, allons-nous effectuer les livraisons en ballon ?

Pas tout à fait, mais presque….

En 1863, Jules Verne a imaginé, dans son livre « Paris au XX ème siècle », ce qu’aurait pu être notre capitale 100 ans plus tard, donc en 1960. Ironie de l’histoire (de la logistique urbaine…), l’éditeur de Jules Verne a refusé le livre, trop décalé et par manque d’intérêt…

54 ans après la date projetée de 1960, comment pouvons-nous interpréter l’imaginaire savoureux de Jules Verne ?

Dans ce livre, nous découvrons, qu’en 1960, Un grand canal de 140 km, reliant Rouen à Paris, permettra de transformer Paris en port maritime autour d’une gigantesque infrastructure, le Port de Grenelle ! Nous découvrons que ce canal sera doublé d’une voie ferrée (nous nous situons évidemment à la grande époque des chemins de fer…).  Même si Paris n’est pas un port maritime, nous constatons aujourd’hui que les initiatives vertueuses d’utilisation de la Seine pour la distribution du centre de Paris se multiplient.

Jules Verne a imaginé 4 cercles ferroviaires concentriques autour de Paris. 150 ans après, ces quatre cercles ont bien été réalisés, mais sont routiers ou autoroutiers.

Mais Jules Verne s’intéresse également à la réglementation. Il imagine qu’en 1960 : « Les moyens de transport étaient dans les rues moins encombrées qu’autrefois, car une ordonnance du ministère de la Police interdisait à toute charrette, fardier ou camion de circuler après 10 heures du matin, si ce n’est sur certaines voies réservées ». Donc Jules Verne imaginait les livraisons de nuit, sujet qui fait actuellement débat.

Il n’est pas allé jusqu’à imaginer un péage urbain …

Bien sûr, ce petit ouvrage plein d’anecdotes improbables et imaginaires cache pourtant des problématiques réelles et des solutions qui auraient pu, au moins partiellement, se réaliser ! Jules Verne savait au moins qu’une métropole, même transformée de façon imaginaire, nécessite une organisation logistique  performante,  en l’occurrence multimodale, en utilisant le fleuve et le fer.

Alors lisons et relisons Jules Verne! Nous y trouverons peut-être une inspiration pour les organisations logistiques de demain…