Le développement des petites surfaces de vente modifie la logistique urbaine

Les grandes villes françaises assistent à des modifications majeures dans la distribution.

Depuis quelques années, la périphérie connait un développement exponentiel des drives. Plus de 3400 drives solos ou accolés aux magasins ont ainsi été réalisés. En 2014, pas moins de 47 drives étaient ouverts chaque mois. Ce modèle, qui a profité d’un vide juridique permettant à des enseignes d’implanter facilement des drives à proximité de concurrents, atteint ses limites mais modifie le mode d’achat périurbain.

Drive Carrefour

Les centres villes connaissent de leur côté un changement aussi profond avec la multiplication des petits formats de vente. Monop’, Franprix, Intermarché express, Carrefour, Casino, Auchan, avec son enseigne A2Pas, Marks & Spencer, développent des concepts de magasins adaptés à la ville.

A2pas

Paris, qui était pendant longtemps dominé par 3 groupes, Monoprix (racheté par Casino), Casino-Franprix et Carrefour, devient aujourd’hui un périmètre de développement pour l’ensemble des groupes de distribution, à l’exception de Leclerc, qui continue à miser sur le secteur périurbain.

Paris a ainsi connu une augmentation du nombre de superettes de 49 entre 2005 et 2007 et de 56 entre 2007 et 2011 (source APUR). Le nombre d’ouvertures et de nouvelles enseignes depuis 2 ans laisse penser que ce taux de progression est en accélération constante.

Les raisons de ce phénomène sont multiples.

Tout d’abord, les centres villes retrouvent progressivement une certaine attractivité. De nombreuses villes comme Toulouse, Bordeaux, Montpellier ou Nantes, voient leur population urbaine augmenter à nouveau, après des décennies de déclin au profit de la périphérie. Paris a gagné 50 000 habitants depuis 2010, mais reste très en deçà de la population qui était celle de la capitale il y a un siècle.

La population urbaine n’est plus la même. Certains quartiers accueillent une population active urbaine, les fameux bobos. D’autres quartiers regroupent les segments les plus pauvres de la population. Ainsi, l’INSEE nous indique que 20% de la population habitant en centre-ville ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté. La population urbaine est de moins en moins motorisée. Le clivage entre population urbaine qui fait généralement ses achats à pied et population péri-urbaine multi-motorisée habituée aux centres commerciaux est de plus en plus présent.

Ces petits formats de vente urbains permettent de pourvoir aux besoins d’achats discount et aux modèles actuels de points de proximité de type snacking.

Les amplitudes horaires sont de plus en plus larges tant le soir que le week-end.snacking

L’étroitesse de ces formats de vente nécessite un approvisionnement quotidien. Certains points sont même approvisionnés deux fois par jour, le modèle se rapprochant de celui des pharmacies.

Autre phénomène, les livraisons à domicile continuent de se développer rapidement, aidées par une politique commerciale agressive des enseignes.

Ce développement des petites surfaces de vente de l’ordre de 100 m² ou moins, qui apportent aux habitants un service de proximité, nous rapproche de l’histoire des villes, qui ont connu de nombreuses enseignes aujourd’hui disparues, telles que Felix Potin, la Laiterie Parisienne, Goulet-Turpin, Familistère ou Radar.magasin  Felix Potin des annees 70

L’évolution actuelle des petits formats s’apparente ainsi à un retour vers le passé, et une économie de proximité qui prend le dessus sur une économie du prix le plus bas. C’est probablement une bonne nouvelle.

Ce sujet et son histoire est détaillé dans mon livre « La Logistique Urbaine – les nouveaux modes de consommation et de livraison » Editions FYP. Bonne lecture !

livre logistique urbaine

Une des surprises du Marais

Un moment chargé d’émotions.

La toute nouvelle galerie JPHT, située au coeur du Marais, expose depuis hier les œuvres de Raphaëlle Pia.

oeuvres de Raphaëlle Pia

œuvres de Raphaëlle Pia

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Le Saint Jean-Baptiste de Raphaëlle Pia

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Lumière, couleur, formes étonnantes et une peinture dont on ressent le message avec le temps et l’immersion.

Des forêts, des monstres, un superbe Saint Jean-Baptiste, des chats, à chacun son imagination et son interprétation.

De grandes toiles suspendues, à la façon chinoise, des grands formats horizontaux, et des plus petites œuvres apportent diversité et étonnement.

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Un travail puissant et recherché qui ne laisse pas le visiteur indifférent.

Cette galerie,  récemment ouverte 4 rue de Saintonge, au cœur de Paris (3ème arrondissement) nous offre tous les mois des surprises et la découverte d’artistes dont les œuvres apportent une vision nouvelle de l’art contemporain.

Un lieu authentique, qui apporte dans l’intimité un moment de repos au cœur de ce Paris touristique.

Bonne visite !

A l’heure de la transition énergétique, qui était la « Jamais Contente » ?

Pour ce qui concerne la mobilité des personnes et des marchandises, la loi sur la transition énergétique fait délibérément le choix de l’électrique.

Le texte voté hier en seconde lecture à l’Assemblée Nationale stipule notamment que l’Etat et ses établissements publics devront acquérir au moins 50% de véhicules à faibles émissions, c’est à dire électriques. Le taux pour les collectivités locales sera de 20%.

Peut-être faut-il s’étonner qu’il soit nécessaire de disposer d’une loi pour imposer à l’Etat des obligations !

La transition énergétique est pourtant en marche depuis … 1899.

En effet, à cette époque, l’ingénieur et coureur automobile belge Camille Jenatzy franchissait le cap des 100 km/h avec un véhicule électrique de sa conception, dénommé « La jamais contente ». Plus exactement, ce véhicule pulvérisa le record de l’époque, toujours en véhicule électrique, en atteignant 105, 98 km/h sur le parc agricole d’Achères.

Camille Jenatzy     220px-Jamais_contente      jamais contente

Ce curieux véhicule, en forme d’obus, a été construit par la compagnie générale belge des transports automobiles. Il était doté d’accumulateurs Fulmen (100 éléments de 2V).

Camille Jenatzy créera une usine de fiacres et de camionnettes électriques.

En 1899, il se vend plus de voitures électriques que de voitures à pétrole ou à vapeur.

La loi votée hier, 116 ans après cette performance technologique, nous montre que la mobilité n’est qu’une affaire de temps…

Quoi qu’il en soit, au-delà de l’aspect législatif, nombreux sont ceux qui attendront des mesures concrètes, urgentes. La transition, puisque c’est le terme adopté, ne sera possible que si les détenteurs de véhicules électriques, particuliers, collectivités locales et surtout entreprises de transport, bénéficient d’avantages significatifs. Un très timide premier pas est effectué en imaginant, sans plus de précisions, des  tarifs de péage autoroutier différenciés. Nous sommes vraisemblablement loin du compte. Imaginer un changement d’état d’esprit, mais surtout un choix d’investissement dans des technologies onéreuses, nécessitera des contreparties. L’Etat et les collectivités locales doivent impérativement trouver des moyens d’incitation aux pratiques vertueuses des entreprises qui font le choix de l’électrique.

L’utilisation des voies réservées aux véhicules électriques de livraison est une mesure simple qui pourrait aller dans le bon sens.

Les facilités offertes, sur le plan des horaires, de la vitesse, du stationnement, du coût de l’énergie, de la fiscalité peuvent compléter une palette d’avantages qui sera indispensable afin de développer cette filière. Les difficultés rencontrées par la société MUSES, remarquable fabricant français de véhicules de livraison électrique, témoignent de l’urgence de la situation.

Le principal risque de cette loi, à l’instar d’autres textes législatifs, est de tomber rapidement dans les méandres de l’oubli et de la complexité administrative.  La mise en œuvre de mesures concrètes devient alors nécessaire afin d’éviter que les entreprises ne soient « jamais contentes » !

Plus d’éléments dans mon livre « La Logistique Urbaine – les nouveaux modes de consommation et de livraison » Editions FYP.

livre logistique urbaine

La Logistique Urbaine à l’aube de la COP 21

A 6 mois de la conférence COP 21 sur le climat, force est de constater que les efforts sur le climat portent plus souvent sur les commissions, débats et discussions que sur des actes concrets.

La transition énergétique, objet de plusieurs lois, dont celle récemment votée, ne serait-elle qu’une occasion de montrer des volontés générales ?

Force est de constater qu’en ce qui concerne la Logistique Urbaine, de nombreuses start-ups créatrices de solutions innovantes et vertueuses, peinent à se développer et à survivre.

Souvent pionnières, basées sur la technologie, elles fondent leur modèle de développement sur la mise en pratique rapide des décisions politiques et un réel changement de comportement des utilisateurs et des consommateurs. Mais ce changement se fait attendre…

Le dernier épisode de cette série, qui a connu de nombreuses expériences parfois douloureuses, est la mise sous protection judiciaire de la société Muses.

Remarquable exemple français de production industrielle de véhicules électriques de livraison, sous la marque Mooville, cette société fait face à des difficultés notamment commerciales.

Malgré des clients prestigieux comme La Poste, Chronopost ou DHL, son carnet de commandes n’est constitué que d’une dizaine d’exemplaires alors que sa chaîne de production est prévue pour 250 véhicules par an.

Véhicule Mooville présenté à la SITL 2015

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La société Muses se situe pourtant dans la droite ligne de la transition énergétique dans les transports. Passer du diesel à l’électrique, permettant ainsi de réduire les émissions de particules et de CO2, constitue un enjeu reconnu par tous. Bien évidemment, même si Muses a tout fait pour rendre l’électrique abordable, le surcoût par rapport au diesel existe et freine les prises de commandes.

Maîtrisant le calendrier de cette transition énergétique, l’Etat a donc une responsabilité directe dans l’aide à la survie et au développement de ces initiatives industrielles qui vont dans le sens de la loi sur la transition énergétique.

L’aide de l’Etat peut avoir différentes formes.

L’aide financière directe est une solution, même si elle reste difficile en période de restrictions budgétaires et très aléatoire.

Le principal levier est de permettre aux opérateurs qui font le choix de ces véhicules innovants de disposer d’avantages par rapport aux autres, notamment sur la productivité quotidienne de leur travail de transporteur.

Autoriser les véhicules électriques sur les voies réservées est une priorité absolue, permettant à ces opérateurs de rouler plus vite en électrique qu’en diesel et d’effectuer plus de positions par jour. La voie réservée sur l’A1, dont la Logistique Urbaine est le grand oublié, est un excellent exemple concret.

Disposer d’avantages sur le prix de l’électricité est également un levier possible. Des leviers fiscaux peuvent également être étudiés dans ce cadre.

L’installation de prises rapides dans les villes ne constitue qu’un des éléments permettant le développement de véhicules de livraison électriques. Il est loin d’être suffisant.

Mon livre « La Logistique Urbaine – les nouveaux modes de consommation et de livraison », paru aux Editions FYP, étudie les possibilités dont dispose l’Etat et les collectivités locales pour permettre la mise en pratique la transition énergétique dans les livraisons urbaines.

livre logistique urbaine

L’exemple de Muses, qui constitue un des symboles de la filière industrielle française de véhicules de livraison électrique, doit nous faire réagir et nous faire comprendre l’urgence qu’il y a à trouver des solutions de compétitivité de la livraison en véhicule électrique.

Passer de la théorie à l’action afin de réussir la transition énergétique est là l’enjeu des prochains mois avant la COP 21.

Jean-Louis Missika est-il un passionné de logistique urbaine ?

La réunion qui s’est tenue le 13 mai à la CCIP dans le cadre des rencontres du club Entreprises La Tribune avait pour invité Jean-Louis Missika, adjoint à la Maire de Paris en charge de l’urbanisme, de l’architecture, du Grand Paris, du développement économique et de l’attractivité.

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Ce débat, animé par Jean-Pierre Gonguet, avait comme sujet central La Ville Intelligente, grande ambition de Paris, pilotée par Jean-Louis Missika.

Est-ce un effet de mode ou une véritable évolution des prises de conscience, la logistique urbaine s’est trouvée au cœur du débat.

Jean-Louis Missika a défendu l’accès à l’e-commerce des commerces de proximité, mais aussi les nouvelles formes de commerce, comme les magasins éphémères (les fameux pop-up stores).

Il a annoncé une réflexion en cours sur le concept de « réinventer la Seine avec Rouen et Le Havre » et a indiqué que des annonces seraient prochainement faites sur ce sujet, qui concerne directement l’utilisation de la Seine pour la desserte de Paris.

Bonne nouvelle, Uber n’est plus l’ennemi n°1. Jean-Louis Missika a même regretté qu’une « grande compagnie de taxi », sans la nommer, n’ait pas saisi à temps l’opportunité de devancer Uber et de créer un modèle d’Uber français. Il a clairement indiqué que le rôle des pouvoirs publics  n’est pas d’empêcher l’uberisation de la société, qui est inévitable, notamment sur la distribution du dernier kilomètre, mais de fixer les règles du jeu et d’éviter les distorsions de concurrence.

Uber se lancera dans la logistique urbaine. C’est là chose acquise. Reste à savoir quand et dans quelles conditions.

Mais Jean-Louis Missika a également parlé de tous les efforts de la Ville pour développer des bonnes pratiques de logistique urbaine, la charte, les commissions de travail, le travail sur le PLU.

Il a rappelé que 3 ou 4 livraisons sur 10 concernent des livraisons à domicile et que le rôle de la Ville est notamment de rechercher, avec la RATP et la Poste, des emplacements pour des consignes, meilleure solution de gestion du dernier kilomètre BtoC.

Enfin, il a rappelé que le principal enjeu de la Logistique Urbaine est de ne plus « amboliser » la Ville.

Au travers de ce discours résolument logisticien, chose étonnante pour un élu, qui plus est sociologue, en charge de l’urbanisme, nous découvrons des points communs avec le livre que je viens de publier « La logistique urbaine – les nouveaux modes de consommation et de livraison » Editions Fyp.

livre logistique urbaine

La Logistique Urbaine ne peut plus être déconnectée de l’e-commerce. Elle doit impérativement prendre en compte l’évolution de la consommation et notamment « l’uberisation » de la société, le delivery crowdsourcing.

Le fait que les responsables politiques au plus haut niveau défendent cette idée numérique et collaborative de la logistique urbaine constitue une vraie nouveauté et interpelle.

L’objectif est bien sûr de réduire les externalités négatives dues au transport, mais il est aussi de transformer la ville, la rendre plus attractive, plus numérique, plus intelligente. Cette vision particulièrement moderne de la logistique urbaine montre la connaissance approfondie de ce sujet qui est celle de Jean-Louis Missika.

Merci pour ce discours d’optimisme, qui manque tant lorsqu’on parle d’écologie !

Si nous réinventions le transport par pneumatique ?

Le dernier kilomètre e-commerce fait face à un formidable défi.

Tout d’abord, le consommateur exige un délai de livraison plus court. Nous parlons de la livraison jour J, Heure +, voire demain en une heure ou moins, comme lorsque nous commandons une pizza.

Ce transport devra être de moins en moins cher. En effet, l’e-commerce se démocratise. Le panier moyen diminue depuis 4 ans.  Il faudra alors être imaginatif.

Le troisième élément qui influera nécessairement sur le transport B to C sera la nécessité d’agir sur la réduction des externalités négatives dues au transport.

L’histoire des transports nous montre qu’avant l’ère de l’e-commerce, de nombreuses solutions originales ont été mises en place, certaines avec succès. Prenons l’exemple du pneumatique.

Le transport par pneumatique a été inventé par un écossais, William Murdoch, dans les années 1800. Après la Grande Bretagne, Paris a été le théâtre d’expérience pour ce mode de transport révolutionnaire !

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William Murdoch, l’inventeur du transport par pneumatique

Nombreux sont les parisiens qui ont encore mémoire ce réseau de transport, qui ne s’est arrêté qu’en 1984, il y a à peine plus de 30 ans.

En 1866, l’administration des télégraphes décide de créer une ligne de tube à ciel ouvert entre la Bourse et le Grand Hôtel (Boulevard des Capucines). Il s’agit là de la première ligne commerciale de plus d’un kilomètre de long. Le réseau s’étendra progressivement et atteindra à son apogée, en 1934, pas moins de 450 kilomètres de long avec plusieurs diamètres de tubes de 65 à 300 millimètres.

En 1945, plus de 11 millions de plis ont été envoyés par ce moyen de transport.

De nombreuses infrastructures publiques ou privées de pneumatiques ont été mises en place depuis cette période, dans de nombreux pays. Le pneumatique est adapté à des plis bien évidemment, mais aussi dans certains cas à des petits colis. Un réseau d’une soixantaine de kilomètres a d’ailleurs été installé à Prague et continue de fonctionner, y compris pour des petits colis qui s’intègrent dans des tubes.

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La vitesse du transport par pneumatique est de l’ordre de 10 mètres par seconde, soit quasiment la vitesse d’un drone !

Le pneumatique reste très largement utilisé pour le transfert d’argent ou de documents à l’intérieur d’un site. Il nécessite des installations fixes significatives, comme tout réseau de transport.

Bien sûr, son marché d’origine pour des télégrammes ou lettre a disparu. Mais une utilisation pour le transport de petits colis est-elle totalement utopique ?

Mon livre « la logistique urbaine – les nouveaux modes de consommation et de livraison », paru aux Editions FYP, retrace l’histoire des nombreux moyens de transport utilisés dans les villes au fil des siècles. Le pneumatique en fait partie.

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Une surprise et un abandon

La disparition de Mory, le plan social chez Gefco et maintenant la vente imprévue de Norbert Dentressange à XPO, tant d’annonces qui témoignent d’une évolution profonde et rapide du monde du transport et de la messagerie en France.

Le groupe XPO, acheteur de la forteresse Norbert Dentressangle, mérite une attention particulière. C’est en effet le spécialiste du dernier kilomètre de produits volumineux. Il y a fort à parier que ce savoir-faire, dont ne dispose pas totalement ND en France, complètera bientôt le catalogue des prestations de ce groupe. Livrer des produits électroménagers ou mobiliers à des particuliers ou à des entreprises constitue un métier bien spécifique, qui est celui de XPO, qui se présente comme le n°1 de ce secteur en Amérique du Nord. Ce segment de marché est en croissance et rares sont les intervenants qui ont développé ce savoir-faire.

Une des autres spécialités de XPO est le transport intermodal.

Petit clin d’œil de l’histoire, le génie de Norbert Dentressangle a été de miser dès 1978 sur les échanges avec la Grande Bretagne, à une époque ou peu nombreux étaient ceux qui imaginaient son ouverture rapide vers l’Europe. Le dernier kilomètre n’a pas été le fer de lance de ce groupe, qui s’est développé sur la longue distance, la messagerie palettisée, la logistique.

Mais cette annonce qui réduit encore un peu le nombre d’intervenants Français de taille internationale dans le transport de marchandises, n’est pas la seule à marquer cette semaine habituellement calme.

Cette semaine est aussi celle d’un abandon. L’Autoroute Ferroviaire Atlantique, projet soutenu par l’ancien ministre des transports Frédéric Cuvillier, qui devait relier Lille (Dourges) à Bayonne (Tarnos) avait pour objectif de participer à la transition énergétique et visait à réduire le nombre de camions sur cet axe européen majeur. L’objectif était de transporter dès 2016 pas moins de 85 000 camions par an sur cette voie ferroviaire reliant la Belgique à l’Espagne. Le matériel devait être fabriqué par l’entreprise française Lohr. Nombreux sont ceux qui croyaient en cette autoroute ferroviaire, le pendant Ouest de l’autoroute Perpignan-Luxembourg.

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Comme c’est souvent le cas lorsqu’un projet est abandonné, on met en avant des tracés inadéquats, des impacts sur la population, le coût. Quelles que soient les raisons de cet abandon, c’est sans aucun doute un signe inquiétant à quelques mois de la conférence COP 21.

Il est dommage que les projets d’infrastructure ferroviaires ayant pour objectif de réduire le nombre de camions sur nos autoroutes, et donc l’impact carbone, ne soient pas considérés comme prioritaires.

La vraie raison n’est-elle pas alors l’absence de financement, qui fait peut-être défaut après l’autre abandon, celui de l’écotaxe ?

L’exemple de la loi sur la transition énergétique nous montre, une fois de plus, que la difficulté  n’est pas de voter la loi, mais de l’appliquer. Elle nécessite en l’occurrence un courage politique, un choix d’investissements dans des infrastructures ferroviaires, des canaux, des moyens nouveaux de transport des marchandises.

C’est à ce prix que nous pourrons peut-être un jour voir le nombre de camions sur nos routes diminuer.

Un entrepôt peut-il être une œuvre architecturale ?

Nous découvrons depuis quelques jours les images du tout nouveau site logistique de Vente-Privée réalisé par Jean-Michel Wilmotte à Beaune. Confier à un des plus grands architectes français la réalisation d’un entrepôt, c’est là un pari bien audacieux. En effet, une plate-forme logistique, qui plus est pour le stockage de vin, est soumise à des contraintes réglementaires et économiques qui laissent peu de place à l’art et à l’imagination architecturale.

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La réalisation de la toute nouvelle Philharmonie de Paris et son dépassement budgétaire pharaonique sont là pour nous rappeler que la beauté architecturale est souvent confrontée à des difficultés techniques et économiques difficilement maîtrisées.

Un entrepôt peut-il être un bel objet ? Peut-on admirer un entrepôt comme un musée ou une salle de concert ? Se déplacerons-nous un jour du monde entier pour visiter un site logistique à l’instar de fondation Louis Vuitton ?

Les réponses ne sont pas simples quand on connait les contraintes réglementaires et d’exploitation  imposées dans la logistique. L’essentiel des données d’une plate-forme logistique sont parfaitement codifiées et presque immuables : la hauteur, la profondeur, les portes, les aires d’accostage, les normes incendie…Une plate-forme logistique est devenue un outil standardisé avec un coût maîtrisé laissant très peu de place possible aux apports architecturaux et à l’imaginaire.

Pourtant, Jean-Michel Wilmotte nous montre tout le contraire.

En examinant le site web de Jean-Michel Wilmotte, nous trouvons 15 rubriques de références. La logistique n’existe pas. Ou pas encore… Par contre, nous trouvons des sujets assez proches comme des chais de vinification de grands crus.

Le travail des lignes et des couleurs de l’entrepôt de Beaune (le fameux rose de Vente-Privée) ne laisse pas indifférent. Un bardage peut être habillé, transformé, c’est ce que nous montre Jean-Michel Wilmotte.

Si l’on regarde l’histoire de l’immobilier logistique, ce n’est pas la première fois qu’un grand architecte s’intéresse à l’entrepôt.

Bernard Zehrfuss, architecte du CNIT, mais aussi des bâtiments de l’Unesco, a réalisé le premier bâtiment de Garonor dès les années 1960. Souhaitons que les projets de transformation de Garonor ne mettent pas en péril ce très intéressant témoin du passé architectural industriel français.

L’architecte Roger Taillibert, notamment connu pour des installations sportives comme le stade de Montréal ou le Parc des Princes, s’est également intéressé à la logistique. Il a notamment réalisé le centre de distribution Pierre Fabre d’Ussel.

Plus récemment, Sogaris a confié à Franck Hammoutène la réalisation d’un quai de messagerie à Créteil.

Jean-Michel Wilmotte poursuit donc cette lignée de grands architectes qui considèrent qu’un entrepôt n’est pas une « boîte à chaussures » mais un outil industriel, qui peut avoir une couleur, une image individuelle, une intégration particulière dans son environnement.

Souhaitons que les grands architectes français continuent à nous montrer l’exemple en s’intéressant à l’amélioration des produits d’immobilier logistique qui marquent de plus en plus le territoire.

Mon livre « La logistique urbaine – les nouveaux modes de livraison et de consommation » paru aux Editions Fyp évoque l’histoire des grandes gares routières et l’implication de très grands architectes.

http://www.fypeditions.com/la-logistique-urbaine-les-nouveaux-mondes-de-consommation-et-de-livraison/

livre logistique urbaine

La voie réservée sur l’A1, la transition énergétique, ce n’est pas pour demain !

Une voie réservée pour les taxis et les bus entre Roissy et Paris. C’est a priori une bonne idée. Permettre à des transports « en commun » de rouler plus vite peut améliorer leur rentabilité et le confort des passagers.

voie réservée

Si cette idée est bonne, sa mise en place dans l’urgence l’est moins.

Elle privilégie en effet les modes de déplacements les plus chers, pas nécessairement écologiques. Les trajets en taxi à 60 ou 80 € ne constituent en aucun cas une offre de transport à la portée de la majorité des franciliens.

La nouvelle voie réservée serait-elle une voie réservée… aux riches ?

Certes, les autobus, cependant bien rares entre Roissy et Paris, bénéficieront de cette voie réservée. Mais a priori seulement les autobus financés par le STIF.

Pourquoi le mode du financement du transport en commun serait un critère d’usage ou non d’une voie réservée ?

Pourquoi interdire l’accès à cette voie aux nouveaux modes de déplacements collectifs comme SuperShuttle, Easybus, Uber Pool, les systèmes d’autopartage, qui apportent une réponse collective à des problèmes de déplacements individuels ?

Mais le plus problématique dans la règle édictée n’est pas là.

La première erreur est de ne pas permettre l’utilisation de cette voie en fonction de critères environnementaux objectifs. Ainsi, un taxi fonctionnant au diesel avec en général un seul passager entre Roissy et Paris bénéficiera de cette voie alors qu’un véhicule électrique n’aura pas ce privilège !

Autre erreur, elle oublie totalement la problématique marchandises. Une fois de plus, la logistique urbaine est la grande oubliée. Pour inciter au développement des technologies propres dans le transport de marchandises, GNV ou électrique, il est indispensable de leur accorder des avantages.

Cette voie réservée constitue une opportunité exceptionnelle pour aller dans le sens de la transition énergétique. En effet, la voie Roissy-Paris est un des principaux axes de distribution urbaine, utilisé quotidiennement par plusieurs dizaines de milliers de véhicules.

La loi sur la transition énergétique à peine votée, est-elle déjà remisée au placard des nombreuses lois environnementales adoptées et vite oubliées ?

Le lobbying des taxis, qui obtiennent gain de cause sur un modèle pourtant unanimement critiqué, serait-il plus fort que le lobbying environnemental et citoyen ?

Mon livre sur la Logistique Urbaine étudie notamment le rôle que peuvent jouer les acteurs publics pour permettre la transition énergétique. Serions-nous ici en face d’un contre-exemple parfait ?

Beaucoup de questions et d’interrogations sur une annonce qui pourrait être impopulaire pour tous, les automobilistes, mais aussi ceux qui aspirent à une véritable transition énergétique.

Une semaine très logistique urbaine

La semaine qui vient de s’écouler a été marquée par de nombreux évènements marquants différents aspects de la logistique urbaine et du dernier kilomètre.

La convention Retail Chain, organisé par Premium Contact à la Défense, qui s’est tenu le 14 avril, a permis d’organiser plusieurs tables rondes et ateliers sur ce sujet.

J’ai eu le plaisir d’animer la première table ronde de la journée avec 3 intervenants de qualité. Laurent Soleilhac, directeur marketing de Pickup, a ainsi présenté les 3 modèles hors domicile de Pickup : le commerçant (point relais traditionnel) permettant de gérer 10 à 40 colis par jour, la consigne (Pickup station) qui peut gérer 40 à 100 colis par jour et le Pickup store, prévu pour des très gros flux supérieurs à 100 colis par jour.

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Jérôme Libeskind, animateur de la table ronde d’ouverture de Retail Chain 2015 sur les tendances du dernier kilomètres e-commerce

Eric Paumier, président de Colis Privé, nous a expliqué que le délai de livraison de Colis Privé est identique à celui de La Poste et que le point essentiel, au-delà du délai, est le respect de l’engagement client. Il nous a présenté la politique très qualitative de Colis Privé et l’objectif de réduction du taux d’échec à la première présentation.

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Remi Lengaigne, co-fondateur de Colisweb et Eric Paumier, président de Colis Privé à la conférence d’ouverture de Retail Chain 2015, animée par Jérôme Libeskind

Remi Lengaigne, co-fondateur de Colisweb, nous a expliqué comment une start up peut trouver sa place dans ce monde de grandes entreprises et de quelle façon elle peut apporter un service différenciant de livraison en H+ (2 heures par exemple).

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Cette manifestation du 14 avril a également permis à la FEVAD de faire le point sur les premiers travaux de son observatoire de la livraison e-commerce. Ces travaux nous apprennent que le délai moyen entre la prise de commande et la livraison est de 4,6 jours. Ce délai peut sembler très important mais est en fait la résultante de nombreux facteurs, notamment des modèles économiques de certains sites web. Il peut également varier selon les régions et les périodes de l’année.

La société InPost nous a également présenté l’évolution rapide du réseau Abricolis, qui devient, avec les 70 nouvelles consignes, le premier réseau de consignes en France.

Mais la semaine qui s’achève a également été marquée par des d’autres évènements.

Le 15 avril, le groupement HEC Transports que j’anime, s’est associé au club Tourisme et Management pour accueillir Sylvain Andrieu, directeur du développement d’Uber. Ce que nous apprenons, c’est que la logistique urbaine devra compter avec Uber. En effet, la technologie Uber modifie profondément la façon d’appréhender la mobilité et a pour objectif l’utilisation optimisée des véhicules. Ce modèle adapté à la mobilité des personnes, et déjà présent avec succès au travers de nombreux services dans 300 villes du monde, s’intéresse maintenant aux marchandises.

Uberrush développe des offres de coursiers vélos à New York, Ubereats invente à Barcelone la livraison de repas en … 5 minutes seulement ! Uber a testé à Paris des livraisons avec Fauchon et ne manque pas d’idées pour faire progresser la mobilité urbaine.  Gageons que nous rencontrerons bientôt Uber dans la livraison B to C !

Autre évènement marquant de la semaine : le 17 avril, je suis intervenu en direct dans l’émission de radio de la Radio-Télévision Suisse sur la logistique urbaine et la présentation de mon tout nouveau livre « La logistique urbaine – les nouveaux modes de consommation et de livraison » Editions FYP. La logistique urbaine n’est plus réservée aux cercles étroits de chercheurs et de professionnels. C’est un sujet qui prend progressivement une connotation Grand Public et c’est là une excellente nouvelle.

L’émission d’une demi-heure est disponible en podcast. Soyez nombreux à l’écouter !

http://www.rts.ch/la-1ere/programmes/tribu/

Enfin, cette semaine a été couronnée par le lancement de l’appel à projets de la Ville de Paris sur des expérimentations de logistique urbaine utilisant l’espace public. La présentation qui a eu lieu le 17 avril a permis de réunir des porteurs de projets et des acteurs publics. Là encore, nous constatons que la Logistique Urbaine est un sujet opérationnel et plus seulement un cas de recherche, même si de nombreuses idées pourront continuer à être développées par la recherche.

Au-delà des pics de pollution qui caractérisent les villes et notamment Paris en cette période printanière, nous voyons émerger des modèles différents et des perspectives tout à fait innovantes, tant sur le plan technologique que collaboratif.